Je suis à peu près une charogne, pensa Vlanck.
(Il faut envisager une charogne claire et ithyphallique. Car, je vous le dis tout à trac, Vlanck est beau.)
Beau et atroce.
Traînant sa carcasse ossue, de ses doigts acérés il touche un clavier déglingué, couvert de raclures putrides.
Il écrit.
Vlanck s'accroche à l'écriture... pour ne pas finir dans une misère aussi nue... mais la misère le rattrape, et l'horreur aussi.
La poésie se retire tout à coup. Elle s'en va gicler ailleurs. Le jour est nu. L'angoisse crue. L'horreur s'ècoule gratuite, sans détour. Vlanck se prend la lumière du jour dans la gueule et crève en respirant…
Plusieurs fois son crâne explosa, sans qu’il en clamse... enfin... il est peut-être déjà crevé... je n’en sais rien.
Dans le beau crâne de Vlanck des images s’allument, et des sons, des orgues, seins aveuglants, beautés déchiquetées… rêves éventrés dégoulinant sur les interfaces mutantes de vomi sensoriel écarlate… viscères éclatés grommelant le chant tranchant du souffle égorgé… carotides en tranches vomissant des phonèmes éclopés — cadavre solitaire pourrissant calmement dans un appartement oublié — foies scintillants, pendus parmi des orgies azurées… et des lames obscènes et des chats hystériques déchiquetant le ciel et d'amples langues fraîches léchant la ponctuation du flux.
L’horreur se faufile entre les draps assourdis de Vlanck, lui liquéfie les boyaux, et éclabousse le silence de ses synapses déglinguées.
Le sens s'écrase sous de claires giclées de bananes vues — la fraîche matinée exulte au fond d'une gorge pinée —
L’os nu hurle dans la nuit.
Extrait de La Chair crue qui s'illumine